■ L’homme qui ne chavirait point ■
8 mars 2011 § Poster un commentaire
Benjamin Fondane
Inspiration dans un temps où tout expire. Poème. Il le crie (car on ne saurait dire qu’il l’écrit) ; il donne aux idées un second souffle – encre et mine de plomb. Au revers de ce linceul – une force rentrée, des rythmes dont on n’a plus l’usage ou le loisir, mais qui rappellent que le poème ne tient sur aucun sol, que des trous peuvent à chaque instant se former, emporter avec eux les fondations, les pros–odies (ou les odes à la prose, pour parler comme Deguy), à l’instar des envolées mnémotechniques de telle grande épopée.
Il y a, chez Fondane, la mémoire même des effondrements : mince fil qui soutient cet homme au ras du gouffre. Comme dans la salle d’attente évoquée par Lupasco, où ce dernier va le retrouver, à la Préfecture française, le lendemain de l’arrestation. – Espace tranché et tranchant où se recroquevillent les ombres, vouées à la réclusion perpétuelle dans leur solitude et dans l’oubli de l’être.
Le condamné Fondane voyage à la verticale du monde, droit et sans détour, vers ces lieux où il n’y a jamais de repos : essoufflement de soi, ferveur, pulsation.
Et encore le poème : tel une exhalaison.
Le condamné Fondane ne chavire point.
- Image : Alberto Giacometti (1901-1966), Homme qui chavire, 1950, Bronze, 60 x 14 x 32,5 cm., Kunsthaus Zürich.
- Texte : Luiza Palanciuc
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