■ E. M. Cioran – éboulement ■
24 mai 2011 § 4 Commentaires
La «prière ininterrompue», telle que l’ont préconisée les hésychastes, je ne pourrais m’y élever, lors même que je perdrais la raison. De la piété je ne comprends que les débordements, les excès suspects, et l’ascèse ne me retiendrait pas un instant si on n’y rencontrait toutes ces choses qui sont le partage du mauvais moine: indolence, gloutonnerie, goût de la désolation, avidité et aversion du monde, tiraillement entre tragédie et équivoque, espoir d’un éboulement intérieur…
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Texte : E. M. Cioran, De l’inconvénient d’être né (extrait), Paris, Éditions Gallimard, 1973, p. 181.
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Image : Luiza Palanciuc, Cioran : éboulement, technique mixte (encre de Chine et montage numérique), 20 x 30 cm., 2011.
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Tagué :ascèse, débordements, E.M. Cioran, hésychastes, Luiza Palanciuc, philosophie, priere, religion
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mais dans quel sens
le mouvement
est-il à lire?
Souvent, l’éboulement est là pour faire entendre la cascade. Char s’y était arrêté («On siffle la cascade de sublimé depuis l’éboulement de l’aqueduc.»). Le reste n’est dès lors que «simple» gravitation: impossible d’y échapper. Même quand on se meut très vite, quand on est (et entend le rester) décalé – comme ce fut le cas de Cioran. En l’occurrence, le décalage est à chercher plutôt sur l’horizontale : une sorte de déplacement (semblable aux taches de couleur qui ne tombent jamais tout à fait à l’intérieur du contour déjà tracé). La ferveur de Cioran est elle-même décalée, implosive : un éboulement vers le centre.
comme si l’éboulement
était une algue de possibles,
comme une indifférence
sur le plan des divergences
L’algue –
à vau-l’eau.
Cherche, pour ma part, la parole pneumatophore, la respiration (et la voix qui porte).
Quand l’histoire s’épuise, les subtils autodafés des pythonisses me sont plus chers que les liquides, les coulures, les caulerpes de la nouvelle philosophie.